Tuesday, August 16, 2011

Loramus, journaliste humanitaire

Le Centre opérationnel des médias est considéré comme la seconde demeure de Rosemond Loramus. C’est à cette rédaction hors-médias montée par Reporters sans frontières qu’il a fait connaissance pour la première fois des aventuriers de Solidar’IT. Sur la même trace, la rédactrice en chef de Youphil.com, l'a repéré. Elodie Vialle décrit "Super Lolo" en lettres et en images.

Rosemond Loramus
Le 12 janvier 2010, à 16h53, Loramus Rosemond se trouvait au 3e étage du Nouvelliste, principal journal haïtien. "Je venais de rendre un papier quand le building s’est mis à trembler, comme si quelqu’un le secouait. Il y avait du brouillard partout. Quand nous sommes sortis, on a vu des gens morts, puis on a essayé d’aider les survivants sous les décombres… Tout était détruit, je ne reconnaissais même pas le quartier… Le pire, c’était les cris, les hurlements, les pleurs."


Ce séisme, qui a traumatisé tout un pays, a donné une nouvelle dimension au métier de Loramus, toujours hanté par le tremblement de terre. "Je me disais ‘comment aider tous ces gens’", lâche-il, ému. Comme de nombreux Port-au-Princiens, le journaliste va errer longtemps dans la ville au décor apocalyptique, parmi les décombres. "A cette heure-ci, il y avait une émission présentée par des jeunes animateurs à Magic 9. Quand je suis passé devant leurs locaux, tout s’était écroulé. Je n’arrêtais pas de pleurer. Chez moi, il n’y avait plus que l’emplacement de ma maison."


L'engagement de Loramus est né avec ce drame. Journaliste culturel pour Ticket Magazine, une publication éditée par le Nouvelliste, il décide alors de se lancer dans le journalisme humanitaire et social, une spécialisation qu’il avait délaissée après s’être fait tiré dessus au cours d’un reportage, quelques années auparavant, lors d’affrontements à Cité Soleil, le plus grand bidonville du pays, situé à deux pas de chez lui.


"Quelqu’un pouvait lire mes papiers et venir en aide aux gens"


Le journaliste de 43 ans choisit après le séisme d’habiter dans un camp, refusant la proposition de sa mère de se rendre chez elle. "Ma place était auprès des gens, justifie-t-il. Quelqu’un pourrait lire mes papiers et vouloir leur venir en aide."

Rosemond Loramus veut aider les plus vulnérables
Avec son métier, il veut aider les plus vulnérables: les femmes enceintes, les personnes handicapées et âgées, qui ne peuvent pas se déplacer lors des distributions alimentaires. "J’ai commencé à leur demander ce qui leur manquait, et j’allais voir les ONG pour leur dire quels étaient les besoins des personnes âgées." Loramus passe alors son temps libre à aider les autres, sans toucher de rémunération. Puis il est embauché, comme beaucoup de journalistes haïtiens, par une ONG. 


Au bout d’un an, il quitte le camp à la suite de violences et s’installe dans un petit deux pièces d’une vingtaine de mètres carrés avec son cousin Ernst, et le fils de ce dernier. C’est là qu’il nous reçoit, dans une petite baraque en briques aux murs décrépis, séparée d’un muret de l’aéroport, au nord de Port-au-Prince.


Le quartier est très pauvre: ici, on vit à peine mieux qu'en face, dans les camps. Pour y accéder, il faut longer les corridors entre les petites maisons sans porte, se pencher pour éviter le linge suspendu, marcher au milieu des poules, sur les gravats. Loramus accueille les voisins qui viennent le saluer ou stocker des denrées dans son frigo, un mobilier que peu d’habitants peuvent s’offrir dans ce quartier. "Ma vie, je la consacre aux autres, confie-t-il avec un grand sourire. "Il s’oublie un peu parfois", renchérit, bienveillant, son cousin Ernst.

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